J'ai hésité beaucoup avant d'écrire un billet sur ma
ville propre, Erevan. Mes relations avec ma ville sont devenues compliquées
comme ceux des anciens amants. Nous nous aimions pendant des années, mais
aujourd’hui nous sommes divorcés, Erévan et moi. Je l'ai quitté, en le laissant
aux autres.
Je ne veux pas donner trop de détails historiques ou
géographiques ici. Après tout, tout cela se trouve dans Wikipedia . Je préfère plutôt a réfléchir sur
les relations complique que j’ai avec ma ville.
Ma ville est trop mutable. Je me demande si toutes les
villes sont comme ça. Ayant presque 3 mille ans d’histoire, l’image de la ville
change avec chaque période historique. La ville se débarrasse de tout ce qui
peut évoquer les mémoires de la passé… Je me demande pourquoi ça arrive à
Erevan. Je n’ai jamais vu un phénomène pareil nulle part…

Puis, en 1990, l’Union Soviétique a chuté et mon pays a
été plongé dans une guerre. Erévan de cette époque était laid, froid et sale.
Pendant des années nous n’avions ni d’électricité ni de chauffage dans nos
appartements, les cafés se sont vidés, et même si le jazz et l’art contemporain
n’avait pas complètement disparu, il nous fallait penser tout d’abord de la
guerre, il fallait battre et survivre. Même 20 ans âpres, je sens toujours le
froid que j’ai eu en attendant dans les lignes pour acheter du pain, le pain
était rationnée, les lignes étaient longues, et les gens ne ressemblaient du
tout les Erevanais de mon enfance : trop fatigues, trop stressés. Nos maisons
en pierre rose, le tuf, sont devenu gris à cause du fume des poêles improvisés
que nous avions mis dans nos appartements modernes pour nous réchauffer.
![]() |
La démolition du vieux Erévan |
On est sorti de la guerre et de la crise vers la fin du
siècle. Le 21e promettait une nouvelle vie à Erevan et à nous tous. Ça y était,
la nouvelle vie…
Cette troisième transformation était pour moi le plus
dure. Car ma ville est devenue une marchandise. Vendu aux nouveaux riches, le
centre historique était démoli complètement. Les édifices commerciaux, les
centres de commerce, les restaurants pleins du chic, souvent d’un gout douteux.
Je ne sais pas comment décrire ce sentiment, mais un jour, pendant une de mes
promenades traditionnelles, j’ai compris que j’ai perdu le lien avec ma ville. La
décision était prise. J’ai divorcé de ma ville.
Est-ce
que je vais revenir? Je ne sais pas encore. Peut-être un jour je serai prête à
accepter ces changements. Aujourd’hui, je les
rejette.
![]() |
Avenue du Nord construit au lieu du centre historique |
De beaux et bons billets qui vous font aussi pratiquer votre français écrit. J'ai été aussi emballé par votre billet sur Venise qu'attristé par celui sur Erevan.
ReplyDeleteBonne fin de trimestre !
PL
Merci de votre commentaire, M. Leroux, désolée de l`avoir manqué! Effectivement, mon choix de l`Université de Montréal est expliqué par cette raison même: il me faut pratiquer mon français:)
Delete